LA MEDINA

La Medina de Constantine est le cœur historique de la cité.
Lieu hautement stratégique, elle est située sur un plateau rocheux à 649m d'altitude et défendue sur trois de ses côtés par les gorges profondes du Rhumel et les parois vertigineuses de la falaise qui domine la plaine du Hamma. On ne peut y accéder que par une langue de terre à l'ouest du quadrilatère formé par le plateau.

Vue aérienne du rocher de Constantine   Coucher de soleil sur la plaine du Hamma



L'originalité de cette médina, outre sa situation géographique, est constituée par les deux types d'urbanisme et d'architecture qui s'y côtoient : d'une part l'urbanisme arabo-musulman avec ses espaces très hiérarchisés et d'autre part l'urbanisme européen.


L’EPOQUE OTTOMANE

A l’époque ottomane, en dehors des défenses naturelles, la ville était protégée par des remparts percés de quatre portes :

  • bab el Oued,
  • bab el Djedid,
  • bab el Jabia,
  • bab el Kantara


La ville répondait aux critères de l'urbanisme arabo-musulman. Les espaces résidentiels étaient séparés des espaces économiques et donc publiques. Les artisans étaient regroupés par corps de métier. La ville compacte était desservie par un réseau de voies sinueuses, s’adaptant à la topographie accidentée, mais aussi au climat en créant des zones d’ombre qui permettaient aussi les rencontres et les contacts humains selon une hiérarchisation bien précise. La rue principale, à vocation commerciale, était empruntée par tous ; une série de voies intermédiaires, plus ou moins animées, à statut semi-public, faisaient le lien entre les axes principaux et permettaient l’accession aux impasses à fonction exclusivement résidentielle et donc fermées aux regards étrangers. Ces rues tortueuses, étroites, pavées étaient inaccessibles aux voitures.
Afin de rendre inviolable l’espace domestique, de sauvegarder l’intimité familiale, la maison traditionnelle était entièrement tournée vers l’intérieur. Les murs des façades étaient le plus souvent aveugles ou percés de toutes petites fenêtres. Pas de décorations intempestives. Seuls des saillies et encorbellements chevauchaient la rue étroite pour former des passages couverts et amplifier encore l’irrégularité des façades.
On entrait dans la maison par une pièce en chicane : la "Sqiffa" qui formait un sas pour le tri des visiteurs et un écran avec l'extérieur.
L'élément central était le patio ou "wast-ed-dar", cour intérieure à ciel ouvert (mais qui peut être aussi aujourd'hui protégée par une verrière) autour de laquelle s'articulaient les différentes composantes de la maison. Il servait de régulateur de température, de source d'éclairage et d'ensoleillement et c'est l'espace où se retrouvaient tous les occupants et avant tout, les femmes.
Cette ville composée de ruelles, passages voutés, placettes, fontaines, mosquées, maisons avec cour intérieure, était le témoin d'une civilisation et d'un art de vivre millénaire.


LA COLONISATION

A partir de 1838 et jusqu'à l'indépendance en 1962, de nombreux travaux sont entrepris par les français. Une ordonnance du 9 juin 1844 décide la division de la ville en deux quartiers : « indigène » et « européen », ce dernier situé sur la partie haute du rocher.
La rue nationale, actuellement rue Larbi ben M’hidi, et encore appelée aujourd’hui "triq Jdida" (qui veut dire "nouvelle rue") est percée sur toute la longueur de la médina, qu'elle coupe en deux parties. Elle relie bab el oued et bab el kantara, dans le souci de faciliter la circulation entre les quartiers européens et la gare de chemin de fers (construite aux environs de 1865) située à quelques enjambés du pont el kantara. Ainsi, si la partie basse de la ville reste intacte, la partie haute subit la destruction de pans entiers d’habitations et même d’édifices religieux. On y perce de grandes artères, les rues se coupent à angle droit, des places et placettes aèrent la ville, les façades coloniales bien alignées masquent les habitations anciennes. En dehors du rocher où se trouve la médina, les quartiers européens vont être construits ça et là, sous forme de faubourgs selon les affinités régionales métropolitaines ou européennes.
La médina de Constantine reflète aujourd’hui encore cette occupation de l’espace par ces deux types de conception urbanistique.

 

 

LES VESTIGES D E L’HISTOIRE

Souika
("Soui" "ka", diminutif de "souk", et qui signifie "petit marché") est la survivance de la ville à l’époque ottomane telle que l'ont découverte les français en 1837. C’est un des quartiers le plus résidentiel et le plus connu. Partie basse de la médina, elle est située dans un triangle délimité par les gorges du Rhumel à l’est, le prolongement du pont Sidi Rached au sud ouest et la rue Larbi ben M’hidi.  C'est dans cette partie de la médina que les différents corps de métiers artisanaux étaient installés, savamment organisés et regroupés selon leurs degrés de nuisances aussi bien auditifs qu'olfactifs. C'est ainsi que les tanneries qui dégageaient des odeurs nauséabondes étaient situées le plus près possible des gorges du Rhumel, non loin des dinanderies qui provoquaient des gênes d’ordre sonore.
Une autre rue où fleurissait le commerce part de Bab el Oued (côté théâtre régional) et aboutit à la place Rahbet Essouf (place des galettes). Sur toute sa longueur, outre le grand bazar,  il y avait des marchands d'étoffes, des droguistes, des selliers, des cordonniers, des passementiers.
Quant à la rue vieux, on y trouvait les fabricants de tamis, les menuisiers, les chaudronniers et les bouchers.
Autre témoin des temps anciens, non loin de bab el Djabia,  le mausolée (mosquée et tombeau)  de Sidi Rached, saint protecteur de la cité, est bâti sur la pointe sud du rocher. La date précise de sa construction n’est pas connue. Néanmoins, on sait qu'elle est antérieure à l'époque ottomane.

 

Salah Bey (1771-1791), fût l'un des beys les plus aimés de la ville. Il avait entrepris une série de grands chantiers pour embellir la cité. C'est ainsi qu'il fonda, dans la partie haute de la médina, la place du marché souk el Asser et la mosquée Sidi el Kettani ainsi que Dar el Bey. Il y  fonda, aussi, la medersa  d'El Kettania (en 1775), qui donna à cet endroit précis de la ville un cachet particulier où les cultures et symboles musulmans et juifs se côtoyaient à travers les différents édifices du site: souk, mosquée, mausolée, médersa, synagogue, lycée français….
Ces lieux historiques de Constantine sont encore aujourd’hui les témoins du passé riche et mouvementé de la cité des aigles.

 

rues de Souika
Maisons de Souika
Le mausolée de Sidi Rached sous la grande arche du pont du même nom Les toits de Souika Jardins du palais du bey

DERNIERE MISE A JOUR
14.05.2012 19:32