Cinquante ans après Adieu mon pays, la première de ses chansons qu’il continue d’emporter avec lui sur toutes les routes et toutes les scènes, l’itinérance d’Enrico Macias se poursuit et s’élève dans un nouvel album qu’on pourrait qualifier de « cosmopolite », en écho à l’auto-portrait « né pour être cosmopolite » que le chanteur de Constantine esquisse en entretien avec le quotidien La Provence.
« Si je l’ai intitulé Voyage d’une mélodie, explique-t-il dans les colonnes du journal méridional, c’est parce que les mélodies voyagent effectivement dans le monde. Ce que j’ai fait, c’est que j’ai essayé de les attraper. C’est pour ça que j’ai mis des chansons arabo-andalouses, des chansons d’Europe de l’Est, des chansons yiddish, des chansons berbères – ce qui est une première pour moi -, de la musique chantée en ladino, qui est le yiddish espagnol… J’ai voulu faire un tour du monde des cultures pour rendre complémentaires nos différences. »
Rassembleur dans sa musique, Enrico Macias demeure en dehors intraitable, droit dans sa culture, inflexible dans ses convictions. Eric Briones, alias Darkplanneur sur la toile, en a fait l’expérience quelques jours avant le passage de l’artiste, entouré de ses amis, sur le divan rouge du Vivement dimanche de Michel Drucker. Invité du numéro 38 de la webémission le Cabinet des Curiosités, le chanteur de 72 ans est parvenu à bousculer un Darkplanneur qui tient habituellement les rênes dans la jungle de la psychanalyse artistique de ceux qui se prêtent à son interrogatoire.
Revêche, mais aussi émouvant et drôle (« Les frères Coen ? Cohen, ça me dit quelque chose, mais les frères Coen… »), ou encore spirituel à l’orée du mysticisme, Enrico Macias s’est livré sans retenue, quitte à improviser un numéro d’air guitar/air batterie sur une version à peine reconnaissable du Highway to Hell d’AC/DC en lâchant, rigolard, « le prochain album, j’sais pas si ça va pas être du hard rock ».
« Suzy, je dois lui rendre hommage tout le temps… »
Après un intervalle, depuis son précédent album, marqué par deux deuils extrêmement douloureux, suite à la perte de son épouse et muse bien-aimée Suzy fin 2008, et celle de son complice de toujours Jacques Demarny, son parolier mais aussi et surtout son « frère », son « deuxième moi-même », on pouvait à bon droit s’attendre à trouver la marque de ses épreuves dans son nouveau disque. Au contraire, celui-ci s’enorgueillit d’une joie de vivre qui prend un tour à proprement parler métaphysique : « J’ai choisi des chansons de fête. Chez nous, dans notre culture, on chante d’abord la joie. Et vous savez, quand on perd un être cher, on chante toujours. C’est jamais noir (…) La musique, c’est le seul langage qui existe entre l’au-delà et ici. Il n’y a pas d’autre moyen de communiquer avec les gens qui ont disparu, » explique-t-i l à Darkplanneur. « La tradition veut qu’on accompagne l’âme de la personne qui s’en va et qu’on apporte du réconfort à ceux qui restent et qui souffrent », complète-t-il dans La Provence.
Bien évidemment, la force de la tradition et de la musique ne comble pas le manque : « Ma femme était malade et j’ai eu peur de la perdre, et puis je l’ai perdue quand même, mais elle est toujours là. Finalement, ma peur est remplacée par ma foi. » Une foi chevillée au corps, une foi doublé d’une mission affective : « Je ne peux pas oublier Suzy, et je ne veux pas que Suzie soit oubliée par le public. Je dois lui rendre hommage tout le temps. »
« Quand j’ai pris un engagement pour quelqu’un, je ne change pas si vite… »
Cette loyauté qui l’honore, presque à contre-courant des moeurs modernes, s’exprime sur un autre terrain : celui de l’engagement politique, qui est également matière d’affect pour l’intéressé. Fervent soutien de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2007, Enrico Macias, qui avait pourtant le coeur à gauche mais a accordé sa confiance à Nicolas Sarkozy quand Dominique Strauss-Kahn a été écarté de la candidature socialiste, a les idées claires quand on évoque 2012 (où DSK pourrait porter les espoirs de la gauche face au président sortant) : « Quand j’ai pris un engagement pour quelqu’un, je ne change pas si vite que cela. Si Nicolas Sarkozy se représente, je le soutiendrai comme je l’ai soutenu en 2007. Je continuerai à la soutenir parce que je l’aime beaucoup, parce que ma religion c’est l’amitié, et je sais que la sienne c’est l’amitié aussi (…) Quel que soit l’adversaire de Sarkozy, je soutiendrai Nicolas Sarkozy, je ne peux pas vous en dire plus. »
Retrouvez les confidences sans ambages d’Enrico Macias dans Le Cabinet des Curiosités numéro 38 au club Privé, visible ci-dessus, avec également des tours de chant aux allures de liesse et des bons mots (« Dans mes veines coulent des merguez et du couscous ») à ne pas manquer.
A noter que Darkplanneur, à l’occasion de la Journée internationale pour les droits des femmes ce 8 mars, lancera une nouvelle émission, intitulée Divas, pensée comme un croisement entre Taratata et Psychologies Magazine. Exclusivement dédié aux chanteuses, invitées à chanter un titre en acoustique et à livrer leur vision de la féminité, ce nouveau programme recevra, pour étrenner les plâtres, la belle Ayo, parallèlement à la sortie de son nouvel album ce lundi, Billie-Eve (baptisée d’après sa petite fille). Une candidate au profil idéal : « Ce que ce titre veut dire, c’est qu’on doit se libérer pour devenir la femme que l’on veut être », expliquait-elle récemment à propos de son nouveau titre I’m Gonna Dance…
Article paru sur Pure people